Alpinisme : Bec de Monciair 3545 m
Bon, alors, tout commence par un problème, comment écrit on le nom de ce p**** de sommet : Bec de Monciair, de Montciair, de Montchair ou becca di Monchair... Sujet complexe, que je n'ai pas encore résolu. J'ai quand même décidé pour le titre, je n'avais pas choix, les différentes propositions ne tenaient pas dans la case.
Pour le reste, encore des problèmes de fenêtres météo qui s'ouvrent et se ferment sans me demander mon avis...
Vidéo
ascension du bec de Monciaie
Topo
Récit :
3 jours de libre en milieu de semaine, Bastien se rend dispo, plus qu'à trouver un objectif à ma hauteur... Bon, le problème c'est qu'il fait pourri partout sur les alpes. Je prends le problème dans tous les sens, il fait crade partout, sauf un village qui résiste encore aux envahisseurs, Pont dans le Valsavarenche, avec le Grand Paradis au dessus, mon rêve est d'en gravir sa face Nord.
J'établis le programme... Jour 1 on pourrait aller au Bec de Monciair, un joli sommet non loin du refuge Victor Emmanuel à faire à la journée.
Jour 2 : Ciarforon, idéalement par la face Nord mais on peut aussi trouver une autre voie, traversée vers le refuge Chabod l'après midi
Jour 3 : face nord du Grand Paradis, à défaut voie normale depuis Chabod.
Reste à réserver et à demander les conditions aux refuges. Pour le Grand Paradis c'est en glace... Et sur la Webcam, il y a du cailloux partout autour de Victor Emmanuel, bilan on partira à pied (oui, au début on avait l'idée de monter les skis...)
La suite est simple : gérer l'intendance, ne pas partir trop tôt exceptionnellement, récupérer Bastien et faire la route. On est parti tard, la nuit nous prend sur la route de la Suisse, l'autoroute est de nouveau fermée sur une portion, il faut sortir et perdre du temps sur de petites routes de campagne. Bastien prend le volant, col du Grand Saint Bernard, puis tunnel, puis descente, les heures passent, nous voilà sur la route qui tournicote dans le Valsavarenche. Quelques chevreuils sautent au dessus du capot de ma superbe Berline, les yeux de Bastien se closent par moment, c'est un peu dangereux, c'est lui qui conduit, mais rassurez vous, on s'habitue.
1 h du mat, nous voilà sur le parking de Pont, je trouve un endroit pour dormir à Bastien : la salle hors sac du parking. Moi, je mets ma voiture en mode nuit, et au lit, Réveil à 6 h 30
6 h 30, faire les sacs avec le dilemme, prendre du matos pour la sécurité, mais pas trop (oui, bizarrement le matos de sécurité est toujours lourd). Bref, c'est une solution bancale, comme à chaque fois, que nous trouvons. 7 h 05 en route, d'abord à plat puis sur les sortes de chemins escaliers empierrés. Le rythme est bon. Je m'amuse à repérer les endroits que nous avions remonté à ski il y a 1 an (ascension à ski de février 2020, juste avant le confinement )
Bref on avance, le rythme est bon, le Ciarforon et les Bec de Monciair apparaissent, l'objectif est encore loin.
Le refuge approche, 2 trailers nous passent devant à vive allure, on maintien le cap, puis on parvient sur la terrasse... Petite pause, pour laisser ici le matos inutile et se restaurer. Je suis content , on a mis moins de 2 h pour arriver là.
Il fait grand beau, j'ai encore trouvé la bonne fenêtre, au moins pour aujourd'hui
On repart au dessus, dans le dédale de cailloux qui était sans doute sous un glacier il y a 20 ans. Bref on galère à aller de cairn en cairn, mais on y arrive, on remonte par un névé vers l'épaule qui monte vers le Ciarforon et on rejoint le Grand Cairn sous l'arête du Ciarforon.
Courte descente d'abord en neige puis dans des pentes merdiques et bien raides en petits cailloux où, si tu te casses la binette... ben tu te fais bien mal. fort heureusement, des décennies de montagne nous évitent de désagréables égratignures.
On laisse les bâtons, on s'encorde et on part sur le glacier, encordement long afin d'éviter une chute dans une hypothétique mais perfide crevasse.
On grimpe, les discussions deviennent incompatibles avec la distance de l'encordement et le vent, on a juste le droit de profiter de l'endroit, de ses montagnes majestueuses. On passe la rimaye sur un joli pont de neige qui semble solide, puis on remonte un couloir un peu raide mais pas trop avant de faire une pause sur les rochers. On se restaure , on se réhydrate et on regarde la suite, une longue pente à 45° à faire en traversée... Heureusement ll y a une vieille trace qu'il suffira de suivre.
A présent, c'est Bastien qui est devant, bien concentré. je suis 4 m derrière, le vide se creuse, la progression n'est pas très rapide, mais régulière. La qualité de la neige est bien variable, ça va de la semoule à la neige hyper dure. Avec quelques surprises quand tu ne t'attends pas le pied s'enfonce profondément. Pendant que Bastien fait laborieusement la trace, je fais l'ambiance en chantant quelques airs du répertoire. Et oui, j'ai aussi, un petit brin de voix. Il me semble avoir vu Bastien mettre ses boules quies à mi pente.
La traversée effectuée on attaque une petite pente en biais puis on remonte jusqu'à l'arête où on enlève les crampons.
J'avoue avoir un peu galoper de bloc en bloc sur l'arête. Un passage bien agréable. Le Grand gendarme s'approche, son contournement semble évident, il est superbe ! On passe par la droite, ensuite la pente se redresse. On avance sur une pente en rocher délicat, avec un poil de neige dessus. Chaque pas révelle une surprise, un bloc qui semblait solide dévale la pente, un pied sur le sentier , emmène celui ci un peu plus bas. Prudemment on remonte jusqu'à une antécîme.
Bastien redescends de l'autre coté, ça semble plus technique. Du haut je le vois hésiter, regarder vers le bas pour rejoinder un collet, je vois bien qu'il utilise des prises qui pourraient lâcher à tout moment... Mon tout vient, personne pour m'assurer du haut, pasglop ! Je passe la dalle du haut puis descends relativement facilement jusqu'au dessus du collet. Le passage n'est pas dur, mais les pieds et les mains sont sur des blocs de gravillons compacts à la solidité toute relative. Face à la pente, je vois que ma prise main droite semble se désolidarisé de son soclue. Heureusement mon pied droit ne bouge pas et je rejoins Bastien au collet dans la neige.
Il repart vers le haut, et vers le haut, c'est merdique, une pente de neige puis de la glace, un passage mixte et du gravillon raide en sortie avant de retrouver un semblant de vire. Bastien part, rejoint facilement la glace puis remonte lentement le passage technique en contournant la partie mixte par la gauche. Je vois son coup de pied hésitant puis le crampons planté dans une glace fine vient glisser sur la dalle sous-jacente. Par un mouvement bien senti il parvient à se redresser et à traverser, la vire est à lui.
C'est mon tour, moi qui déteste affronter un passage où j'ai vu mon partenaire petouiller. Je remonte jusqu'à la glace mais choisi de passer par le mixte. Crampon droit sur la droite à hauteur de genou, j'essaie de fixer mon piolet à la bonne hauteur, et à bonne hauteur, il trace son sillon dans une glace impure. Je finis par trouver un ancrage correct et me redresse, je farfouille avec mon crampon gauche emmenant de la glace plutôt qu'un appui solide. Ça fini par tenir, je remonte les deux derniers mètres essoufflé mais content.
On part sur la vire puis on remonte les pentes sommitales. Le rocher devient plus solide, nous progressons de blocs en blocs, cherchant à grimper au plus facile. Quelques minutes plus tard, on parvient au sommet, Joli petit sommet avec une chouette vue.
Au Nord l'arête Sud du Ciarforon ne fait pas du tout envie, au Sud, un sommet horrible , il semble fait de tours en rochers délités, il ne doit vraiment pas être gravi souvent...
on attaque la descente avec en tête les deux crux, le passage après le collet et la longue traversée dans la pente à 45°
Assez rapidement on parvient au dessus du collet. Bastien part devant, et assez adroitement il redescend le passage de mixte pour ce coller dans le collet. Je le rejoins avec facilité (plus ou moins, faut pas exagérer quand même) on se retrouve en bas. Bastien gravi la pente opposée sans y trouver d'opposition, je vais devoir faire bonne figure. Le bas (merdique) se franchi relativement facilement (c'est toujours plus facile quand on voit les obstacles) la suite est presque rando.
Nous voilà, dans la descente vers le grand gendarme qui mérite une nouvelle pause photo tant il est beau.
Tandis que j'ai choisi d'enlever mes crampons , Bastien a choisi, lui, de les garder, bilan sur l'arête en bloc déneigée, je galope de bloc en bloc et il a du mal à suivre mon rythme effreiné. Fort heureusemen, ça ne dure pas longtemps, je dois déjà recramponner.
On quitte alors l'arête, la neige a fondu, on s'enfonce parfois trop. Voilà la grande traversée. On traverse rapidement, la neige est un peu transformée il faut rester concentrés. mais on parvient aux rochers pour la pause.
L a suite est rapide, on traverse le glacier on récupère nos bâtons et on remonte sur l'épaule du Ciarforon.
Bon mon plan pour la suite était de prendre la neige au maxi en tirant sur la gauche à flanc sur le glacier. Mais rapidement je me rends compte qu'il est trop tard, la neige est trop soupe, on redescend vers notre trace de montée, nous enfonçant par moment jusqu'aux cuisses. La suite est longue, de cairn en cairn, le retour est un poil long à notre avis. On rejoint le refuge, il est plein, les candidats au grand paradis pour le lendemain sont là. Il est déjà 17 h, il nous reste juste le temps de préparer la journée du lendemain, objctif : arête Nord Est du Ciarforon